« L’art suggestif est comme une irradiation des choses pour le rêve où s’achemine aussi la pensée. » Odilon Redon, À soi-même. Journal.

***

Territoires d’art, de ciel et de lumière

Chez Dominique Meunier, le geste est libre et libère la pensée, et l’ailleurs habitable est son territoire. Création enciellée venue des tréfonds de l’âme, en descente infinie, en surgissement constant, en plénitude lumineuse. Peintre de la fragilité, du presque rien et de l’essentiel, il immacule sans fin l’étendue. On voit chez lui des paysages traversés d’univers, dans l’ignorance absolue des limites, des épaisseurs et des évidences. Paysages fragmentaires en élévation, en vastitude mentale, toujours densément habités de tous les lointains.

Dans une combinatoire aimantée de références picturales subtilement intégrées, de Spilliaert à Frédéric Benrath, Dominique Meunier explore au-dedans les passerelles de la peinture et de la lumière. Il enchante les frontières du visible. Il sait prendre distance avec les facilités de l’ego, avec la fascination sommaire des riches couleurs, et les jaillissements gestuels. Sa gamme est assourdie, souple et retenue, il n’épuise pas l’instant, et laisse venir à lui les murmures profonds des très sensibles tensions intimes. Dans ses sensibles respirations d’art, dans l’approche ténue d’une possible sérénité, et dans les forts tressaillements de l’existence, Dominique Meunier sacre à vif les confins de monde. D’une fluidité nuageuse et gestuelle, il délivre les enveloppes terrestres qui s’agitent au fond des espaces du dedans. Art d’effacement, précaire et cosmique, décanté et allusif.

Art de tensions vitales, sans pesanteur et sans borne. Art d’affleurements chromatiques et de failles ouvertes entre ce qui est et ce qui mue. Peinture des profondeurs enrichie des nécessaires contradictions assumées ente opacité première et lumière vivante, entre expérience de mort imminente et regard de plein ciel, entre mémoire des mondes éthérés et dure expérience humaine. La nature est sa patrie infinie, à la fois omniprésente et lointaine, et toujours en vivante gestation. Elle est comme une terre promise transcendée par le rêve.

Une force souterraine est en action, omniprésente, coextensive à toute surface peinte Intemporelle, elle oxygène au profond l’espace sans fond du fond de l’œuvre… Et la matière palpite.

Les éléments s’unissent, œuvrant ainsi un espace infiniment ouvert. Les denses couleurs de l’artiste absorbent les contours, en masses profondes qui dématérialisent le monde. En surgit une peinture quasi cosmique, en degrés chromatiques, en niveaux de conscience, en fines émergences sans cesse renouvelées.

Tout enfonce et tout renaît, exaltant la tension des demi-teintes qui s’étagent jusqu’aux lumières délivrées, quand la matière se déploie sans limite dans l’espace innombrable. Chocs plastiques de ces étapes, créant, plus que stridences et percussions, subtiles et infinies résonances, où les couleurs vibrent, fascinent et s’étreignent, jouant à fond leurs mystérieux rôles psychiques. Il n’y a plus d’horizon, l’horizon est partout. Très troublante, une contagion douce et forte agit, par l’effet d’art d’une peinture de haute substance, quand l’intériorité la plus secrète s’arrime aux chants du monde. L’obsession de Dominique meunier : « Construire un arbre de paix ».

Dans ses paysages évidés, et dans l’effacement des plaies mondaines, la surface des choses est balayée. Et l’espace tout entier respire.

Christian Noorbergen. Critique d'Art

***

Dans ses œuvres, ce qui compte, ce ne sont pas tant les jeux subtils de la lumière et des ombres, de l'obscurité et des trouées de lumière fulgurante, que le dépassement des apparences au seul profit de l'invisible. Dominique Meunier est un homme de foi, un peintre d'icônes. Il ne veut pas des sentiers battus sur lesquels il est confortable de s'avancer. Il scrute ce qui ne se voit pas, il invente, comme un archéologue de l'au-delà, un espace et un temps supérieurs. Un spectateur amateur de son univers en suspension se trouvera transfiguré devant un tel déploiement de formes où la profondeur égale l'altitude, de couleurs fondues et libres de se déployer, de chaos en train de se métamorphoser en apparitions fantastiques, oniriques, religieuses, au sens où la religion nous relie à ce qu'on ne saurait voir, à ce qui nous concerne en plus haut lieu. Au-delà de nos douleurs, car il faut sans doute avoir souffert, comme le Christ, présent en plusieurs toiles, et vaincu pour oser se lancer sur des chemins de si haut vol. Il y a paradoxalement dans cette peinture lourde de matières, que l'artiste sculpte à tour d'esprit, un essor de l'âme offrant au visiteur une échappée belle hors d'un espace et d'un temps réducteurs, une envolée lyrique, une transcendance assumée. Ce sont des pages de méditation, qui traduisent l'impatience qui devrait être la nôtre de sortir par le haut de notre prison quotidienne. Leçons du Maître Vent qui n'est que spirituel, hymne d'un contemplatif à l'écho du sacré. Voilà ce qui me paraît l'essentiel d'une démarche à ciel ouvert, d'une élévation méritée, accueillant la beauté comme la preuve que nos yeux charnels doivent laisser le plus beau rôle aux yeux de l'âme. On dirait que ce pionnier de l'invisible est le traducteur officiel, mandaté par quelque puissance divine, pour rendre compte de la dimension sacrée de la création naturelle. Ainsi, les ombres et les lumières n'ont de naturel que l'apparence. On trouve ici une Œuvre au Noir, au sens alchimique. Cette peinture est préparée pour le Grand Œuvre. Car en réalité, elle appartient à des courants supérieurs, à des jeux de mémoire qui n'ont pas oublié l'alchimie de nos noces d'or avec tout ce qui nous dépasse, et dépasse même l'angoisse de notre époque incrédule et profane. Avec l'art de Dominique Meunier, on entre dans le temple et l'on est pardonné, rédimé. Une telle vocation artistique, ce n'est évidemment pas un jeu, c'est une édification de soi, un destin.

Michel Lagrange. Écrivain et poète, lauréat de l'Académie Française. Il est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages, dont certains sont des livres de bibliophilie écrits en collaboration avec des artistes contemporains comme ses amis Pierre Soulages, Bernard Foucher. Il est salué par René Char, Pierre Emmanuel, Claude Vigée, Yves Bonnefoy, Léopold Cedar Senghor, Marguerite Yourcenar. Il a obtenu de nombreux et prestigieux prix : Prix de l'Académie française, Chevalier des Palmes Académiques, Officier des Arts et Lettres, Prix Marie Noël, Chevalier de l’Ordre National du Mérite et, Président du Centre Régional du Livre en Bourgogne (2006-2011).

*** 

Comment introduire cette œuvre multiple et déconcertante ? Peut-être en se laissant égarer sur ces chemins au risque de se perdre. C’est tout un univers qui apparaît peu à peu au rythme de ces pages, de ces images. Présence de sources sombres, d’abîmes rocheux, de forêts multipliées à l’infini. Peu de personnages et, encore, à peine esquissés. Mais il serait vain de réduire cette œuvre à une représentation de paysages, même si les images sont fortes et prégnantes. Il s’agit de bien autre chose. Nous pénétrons dans un univers onirique, à la fois rêvé et ressenti. On pressent que le peintre ne s’y aventure qu’avec respect, ce qui n’exclut pas une jubilation certaine.  Les images se mêlent, tantôt dotées d’une lumière apaisante, d’un bleu tendre mais, le plus souvent, ce sont de terres vertes, des ocres, des bruns à la limite du noir qui nous invitent à la prudence. Contraste entre ces eaux obscures aux bleus et verts inquiétants et ces rocs déchiquetés, tellement chinois dans leur inspiration. Pierres clivées, feuilletées des falaise, horizons clairs qui invitent à l’espoir, sérénité des glaces bleutées quasi transparentes et, parfois, le bleu profond de l’océan. La lumière aussi s’impose, toujours en fond de tableau comme un signe d’espoir, tantôt d’un blanc laiteux, tantôt rougeoyante, au sortir d’un nuage terre de Sienne, comme l’explosion d’une joie immense. Mais n’ayons garde d’oublier les arbres, tantôt placés en rangs serrés et où s’ouvre un chemin vers une lumière incertaine, tantôt isolés et luttant seuls contre quelque ouragan, abritant les eaux sombres des étangs, secouant leur chevelure ou s’éloignant en files serrées vers un infini incertain.

Il faut encore aller plus loin et prendre garde aux textes du peintre qui accompagnent les tableaux. On y découvre encore une autre lecture, celle d’une révélation comme on peut en connaître quand on s’est aventuré aux portes de la vie et de la mort. On comprend alors que chaque tableau est, non seulement une aventure picturale mais aussi un effort pour approcher le sens de la vie, pour lire dans la Nature les grands secrets de notre présence en ce monde, les courants telluriques qui nous portent sans que nous en ayons conscience. En ce sens l’œuvre de Dominique Meunier est une tentative pour mieux comprendre l’Univers au prisme de la nature. Le peintre s’aventure au bord du gouffre, sûr de la présence de quelque chose au-delà des apparences, conscient que son parcours est sans fin mais confiant aussi dans la probité de sa quête. Comme d’autres, les Poètes, les Musiciens, les Philosophes aussi, Dominique Meunier connaît les risques de sa tentative mais, comme le dit Platon, « c’est un risque mais c’est un beau risque ». 

Michel Woronoff. Professeur émérite des Universités, Président honoraire de l’Université de Franche-Comté, Président honoraire de la Conférence nationale des Académies de province (CNA). Auteur et traducteur, spécialiste d’Homère. (extrait de l'avant-propos du livre "Aux bords de l'absence et de l'imperceptible - Dominique Meunier") 

***

Seul dans son atelier, Dominique Meunier livre à chacune de ses œuvres une vision de la vie. Au premier coup d’œil, la matière y est reine ou cède sa place au spectacle de la nature. Toutefois, si votre regard s’attarde un peu plus, le subtil jeu des couleurs, des ombres et des lumières, le bucolique et la truculence, tous les artifices de prime abord cèdent délicatement leur place à une force invisible. Même cachée, sa présence ne fait aucun doute et c’est la raison majeure des émotions qu’elles provoquent toutes. Une certitude se dégage pour chacun d’entre nous. Aux détours d’une ombre, d’une couleur ou encore d’une lumière, l’artiste a distillé l’humain et son questionnement universel sur les mystères de notre existence. Nos combats, nos doutes, les turbulences, le fracas, les silences, nos peurs, nos sentiments, notre petitesse, l’éphémère ou encore le divin sont suggérés avec parcimonie et subtilité pour, avec délicatesse et retenue, présenter des fragments de son âme et provoquer la nôtre. Alors se produit l’inattendu. Si l’interprétation reste personnelle et singulière, la contemplation d’une toile offre une parallèle vertigineuse et un voyage extraordinaire durant lequel le spirituel, le pragmatisme et le mystère de la vie se jouent de concert pour mieux tisser une toile, celle de nos émotions. 

Contemplez quelques instants l’une de ses œuvres puis, assurément, vous plongerez secrètement dans une aventure intérieure. Certes, votre épiderme et vos frissons en seront les seuls témoins mais, vous n’aurez qu’une hâte, partager les émotions ressenties avec les êtres qui vous sont chers ou interroger l’artiste. Dominique Meunier libère son âme et chacune de ses œuvres témoigne de l’impermanence et de la fragilité de nos instants de vie. Derrière le minuscule se cache l’invisible et l’immensité de tout ce que l’humanité doit découvrir jusqu’à l’essentiel, le pourquoi, s’il y en a un, de notre existence.

Stéphane Théri. Ecrivain, Romancier, Scénariste, Dialoguiste, Consultant, Formateur.

***

Quelles motivations poussent-t-elles un artiste à consacrer le début de sa carrière ou même sa carrière entière à poursuivre la lumière ; le signifiant de l’attachement à la vie et la référence à l’urgence de l’essentiel et de la pureté ? Ces deux composantes essentielles et existentielles n’étaient-elles pas éteintes dans son âme malgré l’horreur du chaos vécu et devenaient-elles le fruit lumineusement accueilli par la création artistique et la spiritualité ?

Quel sens donné à cette luminosité traversant les couleurs et les noirceurs, les vocations similaires ou contraires qui s’attirent et se rivalisent mais qui, en lui et chez lui, demeurent et meurent malgré la présence de multiples autres échappatoires avec innombrables moyens d’expressivité et d’accessibilité ?

Quelle définition donnée à l’idée de l’invisible comme refuge protecteur, comme envie enflammée qui ne se voit pas mais qui se sent au fond, s’entend de loin et s’étend sans frein par et à traves l’art tellement inspirante guérissante ?

Cette idée serait-elle une source d’inspiration pour les créations artistiques de Dominique Meunier ? Serait-elle sa propre destination indéterminée dont le devenir psychologique est un pur voyage spirituel dans le temps et dans l’espace pour « contaminer » le contenu d’une créativité qui nous éclaire sur un rapport plus intime aux choses, étant imprégné par l’empreinte du temps sur la matière et sur l’émotion ?

Il s’agit des échanges, des interrogations et des idées recueillis autour du parcours artistique de notre peintre et poète visuel. Une trajectoire qui prend toute son ampleur et son intensité d’un accident survenu un jour au hasard comme tout drame ou tout imprévu venant bouleverser, en une fraction de seconde, une conscience, un être, un état d’esprit ou une vie. Et depuis tout a changé ; tout a chamboulé ? Qu’est-ce qui l’a poussé à poursuivre une lumière à trait éphémère qui lui échappait à chaque fois qu’il croyait l’avoir rattrapée ?

Et même, en dehors de son atelier, il ne s’ennuyait pas de la supplier et de suivre ses silences, ses méditations et surtout de concevoir ses configurations du beau à travers son art ? Serait-elle sa propre façon de reconstruire ses fragments et de ses souvenirs ?

Ses tableaux sont l’essence même de la fécondité du vide et d’une histoire racontant en silence le retour d’une vie qui s’est accrochée jusqu’au bout après un départ pour donner essor à son art ; un art pour célébrer cette « réincarnation » comme renaissance de l’invisible et mode de rapprochement entre deux mondes qui s’entretuent et s’entrevivent par l’art.

Ce dernier se contente de valoir ce qui n’a pas été pensé ou projeté par le configuré. C’est l’art dans l’art, le bleu dans le bleu, le net dans le flou, le sens propre dans le figuré pour ancrer dans le réel ; sa rencontre avec le fabuleux et l’irréel.

On ne peut contester la fécondité de l’idée du vide comme univers artistique et poétique enrichissant et inspirant ni négliger la force insoupçonnée du silence et ses réserves. Etant donné ce que ces derniers sont une urgence intérieure et extérieure. Dans les toiles de Dominique Meunier, sa réponse est toujours claire quand la question est de retour :

« Je voudrais être une âme de silence. Demeurer dans le silence qui est la respiration la plus profonde de l’être, c’est comme prier jusqu’à ce que l’on entende le divin. Cette prière, je l’entends notamment dans mes cathédrales minérales, mes natures silencieuses, ces montagnes qui m’enveloppent et que je vous offre dans leurs textures et leurs lumières jusqu’à l’iridescence divine. Pour que vous y trouviez, vous aussi, le repos et la limpidité d’un au-delà caché dans le silence des cimes. Au-delà du sujet que constitue le paysage, je tente de peindre ce qui ne se peint pas : le silence où sont tapis les secrets du monde Il s’agit de peindre la poésie harmonieuse du silence afin que chaque silence soit parfaitement à sa place. Alors le silence devient présence entre le vide et le plein et ouvre un espace où tout devient possible. C’est l’infinité des possibles, comme une immensité qui est la seule à faire paysage »

Le parcours d’un artiste est celui d’un être humain qui se découvre dans sa dimension humanitaire et humaniste.  Il se nourrit du courage de se dévoiler et de faire face de ses plis obscurs jusqu’à aller embrasser ses plaies et ses douleurs et jusqu’à se réconcilier avec son âme souffrante et volante ! Il est bien une question de déclic qui coïncide avec l’aventure de s’élancer dans une quête artistique sans relâche et qui permet de percer le secret du monde invisible. 

« […] je cherche une meilleure connaissance de la réalité ultime des phénomènes cosmiques afin de capter le sensible au-delà des apparences, celles d’une communication secrète entre les mondes invisibles et sensibles qui nous échappe mais que j’ai vue »

La lumière rencontrée au seuil de la mort se révèle être le refuge et l’abri. Elle lui a permis de mettre en ordre le chaos de ses émotions traumatiques, d’explorer les énigmes de la nature et d’être doublement touché par les mystères de la vie.  Par son art, il cherche à cristalliser et à éterniser cette lumière et à marquer la présence d’une réalité spirituelle accentuée par les épreuves existentielles.

Sa conviction artistique est intimement liée à ce que disait Gao Xingjian qui se résume en ces mots : « La peinture vient de l’endroit où les mots ne peuvent plus s’exprimer. Je ne [peins] pas pour laisser quelque chose derrière moi, mais pour soulager ma souffrance. Si l’homme a besoin du langage [de l’art], ce n’est pas seulement pour communiquer du sens, c’est en même temps pour écouter et reconnaître son existence. »

La plupart de ses toiles se caractérise par cette passerelle, cette connexion entre l’intérieur et l’extérieur, le silence et la lumière ou comme disait Baudelaire ces « correspondances » entre l’ici-bas et l’au-delà. Malgré la mélancolie de l’artiste, la forte présence métaphorique de l’homme entre deux univers est bien mise en exergue d’une manière euphorique offrant à la transposition toute son expansion. En outre, il qualifie la peinture par une vraie catharsis ou par un refuge salvateur qui permet de voir le monde autrement et d’apprécier les oxymores qui expriment, à la fois, la différence et la ressemblance entre la vie et la mort, entre le vide et le plein qui « se font une sorte de charité mutuelle » ; dans une fusion spiritualiste où la réalité se mêle à l’illusion en faisant l’éloge de l’expérience silence et de la fécondité du vide.

Par ailleurs, son expression artistique est le tremplin de son optimisme dans ses multiples dimensions y compris la dimension éphémère et l’acmé de la vibration de ses émotions y compris traumatiques. Quant à lui, elle incarne le mouvement dans ce va-et-vient entre la conscience et l’inconscience, l’esthétique épurée et l’esthétique parée et le constant et l’évanescent.  Cette démarche rythmée a l’avantage de réguler le chaos et de servir à tout apprendre de nouveau dans la vie par un retour aux sources et aux origines.

Toujours en quête d’une meilleure connaissance de la réalité enfouie du cosmos et de ses mystères, une sensibilité aiguë se manifeste et se veut plus qu’illustratrice de toutes composantes par le biais de l’art. L’impact de la douleur sur le corps est toujours de retour dans ses témoignages comme le montre d’ailleurs cet extrait : « Le corps a aussi sa mémoire et les douleurs quotidiennes savent me remémorer tous les jours le chaos vécu. Alors je peins et m’interroge chaque jour sur ce que j’ai vécu, pourquoi j’ai survécu et ce que j’ai vu. Je continue à penser à ma rencontre avec les êtres de lumière, à la lumière elle-même, à cet espace de liberté sans fin dont j’ai fait l’expérience et je me questionne sur les racines de la vie et donc celles de la mort, qu’est-ce que mourir, quel est le fil d’Ariane vers la mort, quelle est la porte sur l’après-vie ? Cet événement aux répercussions considérables me rappelle tous les jours la fragilité inhérente à toute vie et l’impermanence. »

Sur les traces de son passé, notre artiste, n’imaginait pas faire une telle découverte surtout qu’il a, longtemps, voulu comprendre l’histoire de ses premières impressions artistiques et émotions esthétiques et l’origine de sa vocation philosophique pour l’observation et pour la valeur contemplative de la nature et de ses éléments.  Concernant ce point, il s’agit bel et bien d’une affaire de généalogie familiale. C’est à sa mère peintre et dessinatrice qu’il a eu ces affinités artistiques et cette sensibilité profonde. Sans trop chercher à interpréter ses influences, la vision intérieure du paysage qui transperce ses toiles, explore le lien non seulement avec les pérégrinations, les espaces idylliques et les préoccupations humanitaires de Camille Corot mais aussi avec le réalisme de Gustave Courbet.

Grâce à la poésie visuelle et à l’art pictural, Dominique Meunier, donne de la voix à la divinité par la distance essentielle et l’ouverture à « la plénitude lumineuse ». Son art est sa véritable vie et sa mère-lumière, elle ne meurt jamais car elle a pris l’âge de l’univers. 

Hanen Marouani. Docteur ès lettres françaises. Elle est poétesse et  l’auteure notamment de quatre recueils de poésie. Par ailleurs elle a traduit une anthologie poétique de l'arabe vers le français. (Préface du livre "Aux bords de l'absence et de l'imperceptible - Dominique Meunier")